Stress hydrique et hécatombe dans le cheptel bovin : Au commencement sont des sources carbonisées.

Dans l’ombre d’une tragédie écologique en marche, le cheptel bovin paie un lourd tribut à la surexploitation des ressources naturelles. À Garga Limbona, berceau de sources vitales comme la Sanaga et le Logone, la déforestation massive et la production intensive de charbon de bois menacent l’équilibre hydrique d’une région essentielle. Entre stress hydrique, appauvrissement des pâturages et déclin des écosystèmes, c’est toute une économie locale qui vacille. Face à l’inaction, le spectre d’une catastrophe environnementale et sociale se précise, appelant à des mesures urgentes pour préserver cet écosystème fragile.

Pierre Hervé Madougou Yagong (Terre et Développement Durable)

3/26/20253 min read

Lorsque le voyageur longe la route Nationale N° 1, entre Meiganga et Nyambaka, précisément au village Garga Limbona, il est très loin de se douter qu’il traverse là une des plus importantes zones de captage d’eau du pays.

En effet à Garga Limbona prennent leurs sources la Sanaga et l'un des premiers affluent de ce qui sera le Logone. La source sur le versant sud-ouest du village Garga se fera Djerem, puis l’imposante et très vitale Sanaga longue de 918 Km qui s’étend sur un bassin versant de 140 000 Km2, couvrant ainsi le quart du pays. Sur son versant est, du village Garga Limbona naît le premier renfort du Logone qui lui affiche une longueur de 950 Km pour un bassin versant de 78 000 Km2. La rivière Vina, longue de 200 Km pour un bassin versant de 1 680 Km2, ainsi que la rivière Mbéré doivent également beaucoup au ville Garga Limbona.

Et c’est donc cette très importante zone de captage d’eau, d’une importance vitale à ne plus démontrer pour le pays et la sous-région, comprenant les villages Nganhi/Roblin, Gunbela, Garga Limbona, Gboutou, jusqu’à Gbabongo qui de manière inexplicable s’est transformée en épicentre d’activités très dommageables pour l’environnement, et plus particulièrement à la disponibilité de l’eau.

Il convient de relever que l’eau, comme l’air et la paix sont classés au rang de Biens Publics Globaux (BPG), concept légèrement voisin des Biens Publics Mondiaux (BPM), tous ayant en commun le fait de produire des externalités positives et/ou négatives pour tout le monde. Porter donc atteinte aux BPG, laisser porter atteintes aux BPG c’est se faire acteur ou complice d’actes aux conséquences insoupçonnables comme c’est le cas dans cette zone de captage d’eau de première importance.

Si le Lom, second bras de la Sanaga connait une effroyable agression de son cours favorisé par son enclavement, les très graves atteintes aux sources du Logone et de la Sanaga qui elles sont exposées ne s’expliquent pas. Ces deux sources sont visibles de la route et un hôtel aménagé quoiqu’actuellement en veilleuse trône au-dessus des sources de la Sanaga. Donc toutes les autorités et compétences passent, voient et peuvent de visu estimer l’avancée des dégâts environnementaux dans la zone. Et personne ne fait rien.

Les dégâts environnementaux sont d’autant plus visibles qu’ils sont principalement portés par deux activités anthropiques : l’agriculture et pire encore, la production intensive de charbon de bois.

L’agriculture qui s’y intensifie ces dernières années est une agriculture issue de la révolution verte. D’un point de vue écologique, elle n’est pas très adaptée pour la zone. Tout ce paysage est devenu une vaste usine à ciel ouvert de production de charbon de bois ! Pour bien estimer les dégâts, il faut garder à l’esprit que sept kilogrammes de bois séché à l’air libre sont nécessaires à la production d’un seul kilogramme de charbon de bois, le rendement moyen de la carbonisation varie de 16 à 30 % du poids de la matière première. Et année après année, cette activité s’intensifie !

Loin de dénoter d’une compétence particulière des populations, la production du charbon de bois est un grave symptôme d’un mal plus grand : LA TRAPPE A PAUVRETE dans laquelle sont enfermée les populations. La trappe à pauvreté est la manifestation la plus forte et la plus constante de la pauvreté du capital humain, c’est-à-dire que les populations souffrent d’une faible éducation et manquent de formations. Se trouvant ainsi dans cet état, elles exercent des pressions sur l’environnement en des activités de prédations primaire jusqu’à l’extinction de la ressource d'une part et leur appauvrissement au dénuement d'autre part.

Le bas blesse très mal en ceci qu’avec la disparition de la ressource bois, la ressource eau également disparait, les calamités naturelles se multiplient, les changements climatiques couplés au réchauffement des températures deviennent la norme.

Les incidences sont très graves. Notamment sur les cheptels bovins et donc sur les moyens d’existence et l’économie. Les externalités négatives produites par la production du charbon de bois dans une zone déjà à écosystème fragile impactent sur les pâturages disponibles et sur la quantité et la qualité de l’eau. Cet état de stress hydrique entraîne un stress dans les cheptels et donc sur les bergers avec des répercussions sociales à très large spectre.

Il urge donc de déclarer ce paysage ZONE DE CAPTAGE D'EAU PRIORITAIRE et d’y développer des programmes conséquents avec en quêtes des impacts sur l’enrichissement du capital, technique et technologique des populations ; des activités de reboisements et de reforestation complémentaires aux premières activités devront être conjointes aux activités d’écotourisme et de développement d’agriculture biologique.

par Pierre Hervé Madougou Yagong (Terre et Développement Durable)