11ème Chroniques du Hajj : Fatwa des étoiles, ce que disent les savants sur le Hajj spatial
Dans cette 11ᵉ chronique du Hajj, Abdoulaye Amadou explore une question inédite : le Hajj est-il possible depuis l’espace ? À l’heure des projets martiens de SpaceX, il revient sur les fatwas et adaptations élaborées pour les astronautes musulmans en orbite. Un regard fascinant sur la manière dont la tradition islamique dialogue avec les défis du futur.
CHRONIQUES DU HAJJ
Abdoulaye Amadou
6/9/20252 min read
Le projet de colonisation de Mars d’Elon Musk, baptisé "Occupy Mars" et développé par son entreprise SpaceX, vise à établir une colonie humaine autonome et durable sur la planète rouge. Ce projet entrera bientôt dans sa phase opérationnelle : dès 2026, des missions cargo non habitées seront lancées pour préparer l’infrastructure, et vers 2030, les premiers hommes devraient s’installer sur Mars.
Le vaisseau Starship, capable de transporter 100 à 200 passagers par vol vers Mars, pourrait également permettre à terme des voyages interplanétaires pour des touristes spatiaux. Une question se pose alors : une fois dans l’espace, est-il possible d’accomplir le Hajj sans retourner sur Terre ?
La question du culte en orbite : un précédent historique
En 2006, cette question a mobilisé près de 150 savants musulmans en Malaisie. La problématique est devenue concrète lorsque Sheikh Muszaphar Shukor, un médecin de 35 ans, a effectué un vol spatial à bord d’une fusée russe Soyouz le 10 octobre 2007. Sa mission de 10 jours coïncidait avec la fin du Ramadan et la période du Hajj, soulevant des défis inédits :
16 levers et couchers de soleil par jour (l’ISS orbite autour de la Terre toutes les 90 minutes), ce qui aurait requis 80 prières quotidiennes au lieu de 5.
L’apesanteur empêche les postures traditionnelles (debout, inclinaison, prosternation).
La Qibla (direction de La Mecque) change constamment.
Un guide islamique pour l’espace : adaptations pratiques
Pour répondre à ces défis, les autorités malaisiennes (JAKIM, Département des Affaires islamiques) ont publié un guide de 20 pages après une conférence de savants. Parmi les adaptations autorisées :
1. Prière (Salat)
Suivre l’heure du lieu de décollage (Baïkonour) pour les 5 prières quotidiennes.
Postures flexibles : prier assis ou allongé si nécessaire.
Qibla : viser la Terre en général, sans exigence de précision.
2. Jeûne du Ramadan
Optionnel en raison des contraintes physiques, avec possibilité de rattrapage sur Terre.
3. Ablutions
Nettoyage sec autorisé (serviette humide) en l’absence d’eau courante.
Une première expérience historique et symbolique
Sheikh Muszaphar a vécu cette expérience comme une "responsabilité envers tous les musulmans". Bien qu’il n’ait pas accompli le Hajj dans l’espace (le pèlerinage exigeant une présence physique à La Mecque), sa mission a ouvert la voie à une fatwa moderne sur l’Islam dans l’espace.
En 2023, l’astronaute émirati Sultan Al Neyadi a suivi des règles similaires pendant son Ramadan en orbite, confirmant la pérennité de ces adaptations.
Le Hajj, par essence terrestre
Les savants s’accordent à dire que le Hajj, en tant que pilier de l’Islam, doit être accompli physiquement à La Mecque. Les rites comme le Tawaf (circumambulation de la Kaaba) ou la station à Arafat nécessitent une présence sur place.
Innover sans trahir : une tradition ouverte à la modernité
Le véritable défi n'est pas d'emporter le Hajj dans l'espace, mais de perfectionner son accomplissement sur Terre grâce aux technologies modernes. Ainsi, tout en restant fidèle à ses racines millénaires, le pèlerinage pourra devenir plus sûr, plus inclusif et plus durable pour les générations futures.
L'innovation au service de la tradition — voilà la voie à suivre pour honorer l'esprit du Hajj à l'ère technologique.
ABDOULAYE AMADOU
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